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Illusion du parieur

« Quand je vais au casino, je choisis les machines qui n’ont pas gagné depuis longtemps puisque leur tour est venu de gagner .»

Définition

Certaines tendances ont été répertoriées quant aux choix que les gens font lorsqu’ils participent à des jeux de hasard. Une de celles-ci consiste à éviter le numéro du billet de loterie qui a été tiré récemment [1] par peur qu’il soit moins susceptible d’être tiré deux fois de suite. Ce phénomène est l’illusion du parieur. On peut parler de l’illusion du parieur lorsqu’une personne croit qu’un événement aléatoire est moins probable de se produire en raison des résultats précédents [2]. En réalité, si un événement est aléatoire et que les tirages sont indépendants, les probabilités de cet événement sont équivalentes et ne sont donc pas influencées par les résultats aux autres tirages. L’illusion du parieur a été démontrée en laboratoire à l’aide d’expériences, ainsi qu’en observant les comportements dans des environnements naturels comme le casino. Ce biais serait présent chez la population générale, mais les individus ayant des problèmes de dépendance aux jeux de hasard y seraient encore plus susceptibles [2].

Exemple

Si on tire à pile ou face avec une pièce de monnaie non truquée, on fait face au hasard. Une pensée fréquente dans le monde du hasard est que lorsqu’un événement se produit plusieurs fois, par exemple, trois tirages du côté « pile » consécutifs, il y a moins de chances que le 4etirage soit également « pile ». Pourtant, puisque ce sont des tirages indépendants, les probabilités de tirer pile ou face sont équivalentes à chaque tirage peu importe les résultats obtenus aux tirages précédents.

Explication

L’illusion du parieur aurait comme origine, entre autres, une mauvaise interprétation des séquences du hasard. Cette interprétation serait associée à la croyance erronée que le hasard devrait s’auto-corriger. Le principe de l’auto-correction signifie que le hasard devrait se rapprocher de sa probabilité globale plutôt que de suivre une séquence quelconque. En d’autres mots, un petit échantillon devrait être représentatif de la probabilité globale que les événements individuels se produisent [2]. Par exemple, imaginons un tirage de quatre pièces de monnaie. La probabilité globale pour pile ou pour face est de 50 % et donc, en théorie, il devrait y avoir autant de tirages piles que de tirages faces. Imaginons que trois tirages consécutifs soient piles, le principe d’auto-correction stipule que les individus prédiront que le 4etirage soit « face » afin de converger vers la probabilité globale de 50%. Autrement dit, le hasard serait ainsi « équilibré ». Cette vision est erronée, car la probabilité que le 4e tirage soit « face » demeure à 50% puisque chaque tirage est indépendant des précédents.


L’illusion du parieur pourrait également survenir en raison de la compréhension du concept de hasard des individus. En effet, il est commun de penser que le hasard mène par exemple à une suite de chiffres non reliés, et donc, ne devrait pas comporter, par exemple, de longues séquences de chiffres identiques. Ce faisant, pour concorder avec cette compréhension du hasard, les individus auraient tendance à considérer les résultats aux tirages précédents lorsqu’ils essaient de prédire le résultat d’un tirage futur [3]. Toutefois, chaque tirage est un évènement indépendant en soi, et n’exerce donc aucune influence sur les autres tirages.

Conséquences

La mauvaise interprétation des séquences du hasard a surtout été liée à des conséquences sur les jeux de hasard. Ses effets ont été répertoriés notamment dans les casinos et les jeux de loterie, tel que manifesté par la tendance à ne pas choisir un numéro qui a déjà été gagnant. Ce type d’interprétation a également été observé dans le contexte des décisions financières [1]. En effet, ce biais s’inscrit dans la tendance à surinterpréter le hasard, c’est-à-dire à croire qu’il y a une logique sous-jacente au hasard. Ce faisant, certains individus investissent plus à l’encontre des tendances, en croyant que les investissements perdants ont une plus grande probabilité de devenir gagnants [1]. Enfin, quoique les décisions économiques soient difficiles à étudier, l’illusion du parieur aurait également été associé à une plus grande probabilité de présenter un solde bancaire négatif [4].

Pistes de réflexion pour agir à la lumière de ce biais

  • Se rappeler que les événements liés à la chance sont indépendants et ne sont pas liés par la logique.

  • Être vigilant-e vis-à-vis les stratégies de paris qui impliquent de prédire le hasard.

Comment mesure-t-on ce biais?

Ce biais a notamment été mesuré à l’aide de tâches ayant pour but de produire, à l’oral, une simulation d’une série de 150 tirages de pile ou face qu’un-e participant-e considère représentative du hasard [5]. L’objectif étant de regarder si les participant-es créent des séquences comportant des répétitions. Par exemple, si, dans la simulation de 150 tirages de « pile » ou « face », un-e participant-e n’inclus aucune séquence de 3 « piles » ou plus de suite, alors il ou elle présente probablement ce biais. En réalité, si on fait 150 tirages, il est hautement probable d’avoir des séquences de 3 « piles » ou plus de suite en raison du grand nombre de tirages.

Ce biais est discuté dans la littérature scientifique :

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Ce biais a des répercussions au niveau individuel ou social :

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Ce biais est démontré scientifiquement :

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Références

[1] Stöckl, Thomas, Jürgen Huber, Michael Kirchler, Florian Lindner (2015). Hot hand and gambler’s fallacy in teams: Evidence from investment experiments. Journal of Economic Behavior & Organization 117: 327-339. https://doi.org/10.1016/j.jebo.2015.07.004


[2] Farmer, George D., Paul A. Warren, Ulrike Hahn (2017). Who believes in the gambler’s fallacy and why? Journal of Experimental Psychology 146(1): 63-76. https://doi.org/10.1037/xge0000245


[3] Boynton, David M. (2003). Superstitious responding and frequency matching in the positive bias and gambler’s fallacy effects. Organizational Behavior and Human Decision Processes 91(2): 119-127. https://doi.org/10.1016/S0749-5978(03)00064-5


[4] Dohmen, Thomas, Armin Falk, David Huffman, Felix Marklein, Uwe Sunde (2009). Biased probability judgment: Evidence of incidence and relationship to economic outcomes from a representative sample. Journal of Economic Behavior and Organization 72(3): 903-915. https://doi-org.proxy.bibliotheques.uqam.ca/10.1016/j.jebo.2009.07.014


[5] Rabin, Matthew (2002). Inference by believers in the law of small numbers. Quarterly Journal of Economics 117(3): 775-816. https://doi.org/10.1162/003355302760193896

Tags

Besoin de fermeture cognitive, Niveau individuel, Heuristique de disponibilité

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Auteur-e

Olivier Vivier est doctorant en psychologie à l’Université du Québec à Montréal. Il est affilié au Laboratoire des processus de raisonnement.

Comment citer cette entrée

Vivier, O. (2024). Illusion du parieur. Dans G. Béghin, E. Gagnon-St-Pierre, C. Gratton, & E. Muszynski (Eds). Raccourcis : Guide pratique des biais cognitifs Vol. 5. En ligne : www.shortcogs.com.

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