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Effets Pygmalion / Golem

« Les attentes que j’ai envers quelqu’un peuvent influencer sa performance. »

Définition

Les effets Pygmalion et Golem sont des types de prophétie autoréalisatrice qui désignent le processus par lequel des personnes en position d’autorité développent des attentes par rapport aux personnes qu’ils ou elles supervisent, ainsi que les impacts de ces attentes sur les actions et comportements des personnes supervisées. Ces attentes de la personne en position d’autorité (quelles soient positives, pour l’effet Pygmalion, ou négatives, pour l’effet Golem) entraînent un traitement différencié de la personne supervisée. Cette dernière adaptera ensuite (le plus souvent de façon inconsciente) son comportement pour se conformer aux attentes de la personne en position d’autorité. L’adaptation de la personne supervisée suite au traitement différencié de la personne en position d’autorité est donc une réalisation de ces attentes, et c’est en ce sens que l’effet Pygmalion/Golem est une forme de prophétie autoréalisatrice. Ce biais a été surtout étudié dans un contexte éducatif [2], mais peut aussi se produire dans d’autres contextes, notamment dans la gestion de personnel en entreprise [3].

Exemple

Une étudiante en littérature suit un cours de création littéraire avec une professeure. Par ses interactions avec l’étudiante, la professeure développe des attentes négatives par rapport aux résultats de l’étudiante. Elle est certaine que l’élève ne passera pas son cours. Progressivement, les attentes de la professeure se concrétisent dans son interaction avec l’étudiante : un ton sec lors des interactions, des regards fuyants lors des discussions, certaines interventions ignorées en classe, etc. Avec le temps, le traitement différencié de la professeure pour l’étudiante en question affecte cette dernière : elle pense qu’elle n’a pas les talents en écriture qu’elle pensait avoir et commence à négliger son cours. Venu l’examen final, celle-ci obtient un échec : les attentes de la professeure, manifestée dans le traitement qu’elle donnait à l’étudiante, ont fini par se manifester dans les résultats de l’élève.

Explication

Plusieurs éléments peuvent entraîner quelqu’un dans une position d’autorité (le plus souvent académique ou professionnelle) à développer des attentes, fondées ou non, sur une personne. Dans un contexte éducatif, les enseignant-es doivent classer leurs étudiant-es selon leurs performances, pour adapter le cours à leurs besoins. Cette classification se fait surtout au début des années scolaires, mais aussi au travers de la communication avec d’autres professeurs. Cela les entraîne à avoir des attentes favorables ou défavorables envers les compétences de leurs élèves. Ces attentes peuvent aussi être influencées par certains préjugés qu’entretiennent les enseignant-es. Si par exemple un-e étudiant-e a un nom à consonance étrangère, qui pourrait être associé à un quartier aux conditions socio-économiques plus « difficiles », il se peut que l’enseignant-e forme des attentes plus négatives pour cet-te étudiant-e [4]. Les étudiant-es, eux, ont tendance à chercher l’approbation de l’enseignant-e pour confirmer leurs compétences dans un domaine donné, et vont altérer la perception qu’ils ont de ces compétences en fonction des attentes de l’enseignant-e. Au final, ceux-ci peuvent prendre ces attentes comme étant un gage de leur compétence. Les contextes professionnels possèdent certains éléments spécifiques à considérer (comme l’attitude des membres du personnel par rapport au travail, et les attentes du ou de la gestionnaire), et la formation des attentes se fait le plus souvent dès la lecture du CV du candidat [5].

Conséquences

Si l’effet Pygmalion et ses conséquences sont la plupart du temps souhaitables (comme de meilleures notes aux examens, ou de meilleures performances au travail par exemple), l’effet Golem, lui, entraîne des conséquences plus néfastes. Comme l’exemple plus haut l’illustrait, l’une des conséquences de l’effet Golem est une perte d’estime de soi et une dévalorisation de ses compétences en plus de la baisse de compétence. Si un ou une spécialiste dans son domaine indique à quelqu’un (un ou une étudiant-e par exemple) que ses compétences ne sont pas adéquates, sa perception de ses talents peut être grandement affectée [1]. Même l’effet Pygmalion peut avoir certaines conséquences négatives : il peut arriver, dans un contexte éducatif, qu’un ou une professeur-e donne de meilleures notes à un ou une élève que ce qu’il ou elle mériterait, sur la base des attentes que l’enseignant-e pourrait avoir, causant une injustice pour les autres élèves de la classe [4]. L’ampleur de ces conséquences a été démontrée de façon claire, et on peut voir une nette différence dans les performances des individus qui sont affectés par l’effet Pygmalion, notamment dans un contexte professionnel [3].

Pistes de réflexion pour agir à la lumière de ce biais

  • Tenter d’avoir une attitude empathique envers des membres du personnel au travail, ou des étudiant-es dans un contexte éducatif [1].

  • Prendre conscience que les préjugés et stéréotypes sont aussi des facteurs qui influencent les attentes [4]. Ces attentes ne doivent pas non plus être le seul critère directeur pour la gestion d’une classe ou d’une entreprise : les attentes formées par la personne en position d’autorité doivent garder une certaine flexibilité.

  • Prendre une part de responsabilité dans les réussites et les échecs de ces étudiant-es, ou de ses membres du personnel lorsqu’on est dans une position d’autorité. De cette façon on neutralise partiellement les préjugés que l’on pourrait avoir sur leurs performances [2].

Comment mesure-t-on ce biais?

L’expérience la plus connue pour mesurer l’effet Pygmalion est l’expérience en milieu scolaire de Rosenthal et Jacobson. On sépare une classe en deux groupes : un groupe test qui ne recevra aucune information, et où l’on ne devrait pas voir de différence dans l’enseignement reçu habituellement, et un groupe expérimental dans lequel les enseignant-es recevront de l’information inventées de toutes pièces sur les capacités académiques supérieures des étudiant-es. Après un certain temps (une demi-année académique par exemple), on compile le progrès effectué par les étudiants et étudiantes dans chacun des groupes. On peut ensuite observer que les étudiants et étudiantes qui étaient dans le groupe expérimental auront une progression plus marquée dans les apprentissages que dans le groupe test, ce qui démontrerait l’existence et l’efficacité de l’effet Pygmalion [2]. Bien que ce modèle d’expérience ait été fondamental dans l’établissement de l’effet Pygmalion, d’autres méthodes plus récentes sont aussi favorisées, notamment une méthode par autoévaluation des étudiant-es, qui permet d’éviter les biais et erreurs potentiels que l’évaluation « normale » peut engendrer.

Ce biais est discuté dans la littérature scientifique :

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Ce biais a des répercussions au niveau individuel ou social :

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Ce biais est démontré scientifiquement :

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Références

[1] McLeod, Susan H. (1995). Pygmalion or Golem? Teacher affect and efficacy. College Composition and Communication, 46 (3): 369-386.


[2] Rosenthal, Robert & Lenore Jacobson (1968). Pygmalion in the classroom. The Urban Review, 3 (1): 16-20.


[3] Kierein, Nicole M. & Michael A. Gold (2000). Pygmalion in work organizations: a meta-analysis. Journal of Organizational Behaviour, 21 (8): 913-928.


[4] Andersen, Ida Gran. (2018). Pygmalion in instruction? Tracking, teacher reward structures, and educational inequality. Social Psychology of Education, 21 (5): 1021-1044.


[5] Veestraeten, Marlies, Stephanie Johnson K., Hannes Leroy, Thomas Sy, & Luc Sels (2021). Exploring the bounds of Pygmalion effects: Congruence of implicit followership theories drives and binds leader performance expectations and follower work engagement. Journal of Leadership & Organizational Studies, 28 (2): 137-153.

Tags

Niveau interpersonnel, Heuristique de représentativité

Biais reliés

Auteur-e

Fabrice Valcourt, étudiant de maîtrise en philosophie à L’Université du Québec à Montréal.

Comment citer cette entrée

Valcourt, F. (2022). L’effet Pygmalion/Golem. Dans G. Béghin, E. Gagnon-St-Pierre, C. Gratton, & E. Muszynski (Eds). Raccourcis : Guide pratique des biais cognitifs Vol. 5. En ligne : www.shortcogs.com

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